Pourquoi un conservateur ne doit pas être… conservateur.
Au cours de son histoire, l’œuvre d’art matérielle connaît une série de transformations, aussi bien en raison de facteurs externes (modifications de format, vandalisme, accidents, contexte historique …), qu’internes, liés à l’évolution des matériaux utilisés. Pour les peintures anciennes, ce processus est souvent abordé sous le seul angle d’une dégradation inévitable, nous éloignant d’une origine fantasmée qui serait le moment de l’achèvement et qu’il conviendrait - autant que possible - de préserver. Les termes de « conservateur » et de « restaurateur » renvoient à cette conception fondée sur une temporalité figée, regardant principalement vers un passé irrémédiablement perdu.
Sébastien Allard propose d’adopter un autre point de vue en considérant positivement les évolutions matérielles des œuvres, non pas comme une dégradation plus ou moins lente, mais comme la marque de leur vitalisme, comme des métamorphoses successives qu’il s’agit, pour le conservateur, d’accompagner, voire d’anticiper. Il y a là un point essentiel qui implique un changement radical de positionnement, la conservation devant intégrer mieux la sédimentation des temporalités, celle de l’œuvre et la nôtre, et assumer la dialectique entre notre propre historicité et l’état de l’œuvre à un moment donné. Il ne s’agit plus d’essayer – un peu vainement - de fixer une origine, de rétablir une achronie, mais de donner à voir la relation qu’une société donnée, à une époque donnée, entretient avec les œuvres du passé, la façon dont elles peuvent encore s’adresser à nous aujourd’hui.
Normalien, diplômé de l’Institut d’Etudes politiques de Paris et conservateur général du Patrimoine, Sébastien Allard est le Directeur du département des Peintures du musée du Louvre. Dix-neuviémiste, il s’est tout particulièrement consacré au romantisme et à l’œuvre de Delacroix, d’Ingres et de Corot. Il a été le commissaire de nombreuses expositions internationales, dont, en 2018, la grande rétrospective consacrée à Eugène Delacroix au musée du Louvre et au Metropolitan Museum de New York et l’exposition « Corot. Le peintre et ses modèles » au musée Marmottan Monet. Il est actuellement le commissaire de « Naples à Paris. Le Louvre invite le musée de Capodimonte » et prépare une exposition consacrée à Jacques-Louis David.
Son ouvrage, coécrit avec M.-Cl. Chaudonneret, Le Suicide de Gros. Les Peintres de l’Empire et la génération romantique avait obtenu, en 2011, le prix de l’essai de l’Académie française. Il travaille à un ouvrage sur l’enjeu du biographique dans l’œuvre des artistes. Encourageant la présence de l’art contemporain et du spectacle vivant au musée du Louvre, il a été, en 2010, le commissaire de l’invitation au Louvre de Patrice Chéreau et a, en 2022, conseillé scientifiquement le spectacle Forêt d’Anne-Teresa De Keersmaeker et Némo Flouret.
Conférence organisée dans le cadre du partenariat entre le Musée du Louvre et les Beaux-Arts de Paris.
Penser le Présent est réalisé avec le soutien de Société Générale.
Amphithéâtre des Loges – 14 rue Bonaparte, Paris 6e
Entrée libre dans la limite des places disponibles
À retrouver en direct sur Instagram et YouTube et J+7 en podcast
Crédit photo : © c-2018musee-du-Louvre_AntoineMongodin